Ubisoft se réorganise : un nouveau chapitre pour le géant français
Ubisoft traverse une période de turbulences. Entre les résultats financiers décevants et les défis opérationnels, l’éditeur français mise désormais sur une restructuration ambitieuse pour retrouver sa position de leader sur le marché du jeu vidéo.
Cette réorganisation en profondeur pourrait-elle marquer le début d’une renaissance pour le créateur d’Assassin’s Creed ? Analysons les enjeux de cette transformation majeure et ses implications pour l’avenir du studio.
Des résultats financiers en demi-teinte
Ubisoft a récemment publié ses résultats pour le premier trimestre de son exercice fiscal 2025-26, révélant des chiffres qui reflètent les difficultés actuelles de l’entreprise. Le chiffre d’affaires s’élève à 311 millions d’euros (364 millions de dollars), soit une baisse de 3,9% par rapport à la même période l’année précédente.
Cette diminution s’explique principalement par les problèmes techniques rencontrés sur « Rainbow Six Siege », l’un des titres phares du catalogue Ubisoft. Malgré ces difficultés, le PDG Yves Guillemot a souligné les performances encourageantes d' »Assassin’s Creed Shadows », qui a attiré plus de cinq millions de joueurs uniques depuis son lancement.
L’indicateur privilégié par Ubisoft, les « net bookings » (qui excluent certains revenus différés), affiche une baisse plus modérée de 2,9%. Pour le deuxième trimestre, l’entreprise prévoit des net bookings d’environ 450 millions d’euros, stimulés par de nouveaux partenariats et les revenus issus des séries télévisées.
Une restructuration en unités autonomes
Face à ces défis, Ubisoft mise sur une réorganisation majeure de ses activités. L’entreprise se divise en plusieurs « maisons créatives » autonomes, chacune responsable d’un portefeuille de jeux spécifique.
Cette nouvelle structure vise à créer « une organisation plus agile et concentrée tout en assurant la stabilité à long terme nécessaire et la vision créative », selon Yves Guillemot. Chaque unité sera complètement responsable de ses objectifs commerciaux, permettant une prise de décision plus rapide et une meilleure adaptation aux besoins du marché.
La première de ces filiales a déjà vu le jour grâce à un accord d’un milliard d’euros avec Tencent, le géant chinois du jeu vidéo. Cette unité de 3 000 employés contrôlera les plus grandes franchises d’Ubisoft : « Assassin’s Creed », « Rainbow Six » et « Far Cry ».
Le partenariat stratégique avec Tencent
La collaboration avec Tencent marque un tournant stratégique pour Ubisoft. Charlie Guillemot, fils du PDG, dirigera cette nouvelle filiale aux côtés de Christophe Derennes, vétéran du studio de développement de Montréal.
Ce partenariat apporte à Ubisoft l’expertise de l’une des plus grandes entreprises de jeux vidéo et d’internet de Chine. Tencent, fort de son expérience sur les marchés asiatiques et de sa maîtrise des jeux mobiles, pourrait aider Ubisoft à étendre son influence mondiale et à développer de nouveaux modèles économiques.
L’autonomie accordée à cette unité lui permettra de prendre des décisions stratégiques rapidement, un avantage crucial dans un marché où la réactivité est essentielle.
Un pipeline de sorties ambitieux
Malgré les difficultés actuelles, Ubisoft maintient un calendrier de sorties chargé. Le remake de « Prince of Persia: The Sands of Time » est prévu pour mars, marquant le retour de l’une des franchises les plus appréciées du studio.
La série « Anno » accueillera un nouvel épisode situé dans la Rome antique, tandis que des versions mobiles de « Rainbow Six » et « The Division » sont en développement. Ces adaptations mobiles s’inscrivent dans la stratégie d’expansion d’Ubisoft vers de nouveaux segments de marché.
Cependant, l’entreprise a annoncé en mai que plusieurs titres majeurs non encore dévoilés subiraient des retards. Cette prudence témoigne de la volonté d’Ubisoft d’éviter les lancements précipités qui ont nui à sa réputation par le passé.
Les défis à surmonter
La route vers la renaissance ne sera pas sans obstacles. L’action Ubisoft a chuté de 28% depuis janvier, reflétant les inquiétudes des investisseurs concernant la direction de l’entreprise.
Au-delà des performances financières, Ubisoft doit également gérer les conséquences d’un scandale majeur. Trois anciens dirigeants ont été condamnés ce mois-ci pour avoir permis une culture de harcèlement sexuel et psychologique, ternissant l’image de l’entreprise.
L’industrie du jeu vidéo traverse par ailleurs une période difficile à l’échelle mondiale depuis deux ans. Les ventes ralentissent, la concurrence s’intensifie, et les coûts de développement explosent. Dans ce contexte, Ubisoft n’est pas seul à faire face à ces défis.
Une transformation nécessaire
La réorganisation d’Ubisoft s’inscrit dans une démarche plus large de réduction des coûts. L’entreprise a déjà fermé plusieurs studios hors de France et supprimé plus de 2 000 emplois. Ces mesures douloureuses visent à retrouver la rentabilité après une perte nette de 159 millions d’euros en 2024-25.
Pour l’exercice en cours, Ubisoft confirme ses objectifs : des net bookings stables par rapport à l’année précédente et un bénéfice opérationnel « approximativement à l’équilibre ». Ces prévisions modérées témoignent du réalisme de la direction face aux défis actuels.
Ubisoft promet de fournir plus de détails sur sa réorganisation d’ici octobre. Cette communication sera cruciale pour rassurer les investisseurs et clarifier la vision stratégique à long terme.
Vers un avenir plus prometteur
La réorganisation d’Ubisoft représente bien plus qu’un simple ajustement structurel. C’est un pari sur l’agilité organisationnelle et l’innovation créative dans un secteur en mutation constante.
Le succès de cette transformation dépendra de la capacité d’Ubisoft à préserver son ADN créatif tout en s’adaptant aux nouvelles réalités du marché. Les partenariats stratégiques, comme celui avec Tencent, pourraient s’avérer déterminants pour conquérir de nouveaux territoires et publics.
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Les prochains mois seront décisifs pour mesurer l’efficacité de cette nouvelle approche. Ubisoft saura-t-il retrouver sa position de leader et reconquérir la confiance de ses joueurs ? La réponse déterminera l’avenir de l’un des acteurs les plus emblématiques de l’industrie française du jeu vidéo.
